Le Français est devenu à Paris le seul judoka triple champion olympique des poids lourds, un nouveau pas de géant pour cette figure sportive qui porte à nouveau son kimono d’invincibilité, trois ans après sa défaite en quart à Tokyo.
Il a commencé ces Jeux en embrasant la vasque olympique avec Marie-José Pérec, Guadeloupéenne et championne comme lui. Il les marque désormais de sa patte d’ours en remportant son troisième or olympique individuel après 2012 et 2016, ipponisant le Coréen Kim Min-jong en finale.
Un exploit jamais réalisé dans la catégorie reine et qui s’ajoute à ses deux autres médailles de bronze olympiques (2008, 2021) et ses onze titres de champion du monde entre 2007 et 2023, pour faire de lui, une fois pour toutes, le plus grand judoka de l’histoire.
Et ces Jeux ne sont pas finis : samedi, il peut viser un nouveau titre par équipes mixtes avec les autres Bleus, après la victoire contre les Japonais à Tokyo. Défait en quart des JO-2021 par le Russe Tamerlan Bashaev, Riner avait ramassé le bronze – et l’or par équipes. Mais l’ogre de 2,03 m et 140 kg avait encore faim. Il a repoussé sa retraite un temps envisagée.
En visant ce nouvel exploit, l’homme aux 2,12 m d’envergure voulait «être et devenir encore plus» le meilleur sportif tricolore de l’histoire, osait-il auprès de l’AFP avant les JO. Pour ça, il ne se fixait pas de limite. Ou alors si: «les JO-2028 à Los Angeles».
«Le Boss»
Pour arriver à son but, depuis trois ans, il a enchaîné compétitions et stages à travers le monde. Invaincu depuis Tokyo, en envoyant au tapis plusieurs champions du monde, il a déjà combattu vingt fois en 2024. Pour retrouver une telle activité, il faut remonter à 2011, début de sa première période dorée.
«La version de moi de 2024 est bien plus forte», assurait-il avec ces Jeux: «mentalement, physiquement, sur le judo, au sol, debout, sur les mains, sur les attaques, je suis meilleur».
«Je l’ai rarement vu aussi affûté, il est plus puissant», confirmait Franck Chambily, son entraîneur de toujours, qui s’inquiétait pour ses adversaires: «Teddy est appelé le Boss dans le milieu. Ils se disent ’le Boss revient nous faire c…+’».
Hors du tatami, plus puissant, Riner l’est aussi devenu. Proche du roi du Maroc, il vit entre Marrakech, «sa base arrière», Paris, pour quelques entraînements avec le PSG ou à l’Insep, et le reste du monde, pour des stages. Et comme aucun autre judoka avant lui, il a construit une «cellule» d’entraînement sur mesure: «j’ai amené une autre façon de voir le haut niveau».
À l’instar de l’importance qu’il donne à sa santé mentale, accompagné par la psychologue Meriem Salmi depuis ses 14 ans, Riner ne laisse rien au hasard, avec un manager (Laurent Calleja), un coach (Christian Chaumont), un préparateur physique (Julien Corvo), un sparring-partner (Frédéric Mirédin)…
«Il nous pousse tout le temps dans nos retranchements, à repenser l’avenir du judo», témoigne auprès de l’AFP Stéphane Nomis, président de la fédération française, qui le voit comme «l’ambassadeur N.1 du judo avec Clarisse» Agbégnénou.
«Joie de vivre»
Pourtant, «à aucun moment» son père Moïse ne s’est dit qu’il allait devenir ce grand champion, également entrepreneur à ses heures perdues. «Ce sont les autres qui nous l’ont fait comprendre», retrace-t-il pour l’AFP. Ce potentiel, ses parents l’ont alors géré «le plus simplement possible».
«Simple» revient aussi dans les mots de Frédéric Mirédin quand on lui demande de décrire Riner, avec qui il passe plus de 300 jours par an.
De son partenaire qu’il connaît depuis vingt ans, il retient «quelqu’un de très exigeant», de «très bien éduqué», qui a «la joie de vivre», aime la «rigolade» et ne refuse jamais une partie de «petits chevaux» pour décompresser.
Ce côté «gamin chambreur», Riner, à son tour devenu père de deux enfants avec sa compagne Luthna Plocus, le cultive. Mais pas n’importe quel gamin.
Celui qui a «toujours été conscient de la différence» avec le commun des mortels. Celui qui, comme sa mère Marie-Pierre l’expliquait avant Tokyo, avait «poussé à la vitesse de l’éclair» et qui «en maternelle faisait déjà autour d’1,30 m».
Hors normes, aucun concurrent n’est à sa taille selon Frédéric Mirédin: «l’adversaire le plus dangereux pour Teddy, c’est Teddy lui-même». Et il a su le vaincre à nouveau.
Source : Afp