« Désormais, l’élection des députés, des conseillers municipaux et régionaux sera plus importante que la présidentielle », a affirmé Gilbert Bawara (ministre togolais de la fonction publique) dans une interview accordée au « Point », justifiant la révision constitutionnelle qui fait grands bruits dans le pays depuis son adoption.
Cette réforme a été définitivement adoptée en deuxième lecture par les députés le 19 avril. Les 87 députés présents avaient approuvé cette révision constitutionnelle qui fait basculer le pays dans un régime parlementaire.
Selon la nouvelle constitution, « le président de la République est élu sans débat par le Parlement réuni en congrès pour un mandat de 4 ans renouvelable ».
La nouvelle constitution institue le poste du Conseil des ministres, une forme de super Premier ministre.
« Le candidat à la fonction du président du Conseil des ministres est le chef du parti majoritaire ou le candidat issu de la coalition jouissant d’une majorité à l’Assemblée nationale à l’issue des élections législatives et après proclamation des résultats définitifs par la Cour constitutionnelle », précise le nouveau texte.
« Désormais, l’élection des députés, des conseillers municipaux et régionaux sera plus importante que la présidentielle. Tous les candidats seront tenus de travailler sur le terrain afin d’avoir une assise solide et pouvoir être élus soit conseiller municipal, soit conseiller régional, soit député. Ce sont les députés qui éliront le président de la République qui remplira un rôle plus symbolique, il sera une sorte d’autorité morale. D’ailleurs, le futur chef de l’État peut n’appartenir à aucun parti politique », a expliqué M.Bawara.
« Quant au président du Conseil, il est l’émanation d’une majorité par rapport à l’autre, il est donc obligé de s’entendre avec l’Assemblée nationale. Ce système nous paraît bien plus ouvert et démocratique. Et puis sur le plan financier, nous allons faire des économies en organisant quatre élections au lieu de cinq. Ce n’est pas négligeable », a poursuivi le ministre.
Cette réforme, a-t-il poursuivi, « va également nous permettre de sortir des logiques de repli régionale et ethnique et les partis vont comprendre que leur avenir dépend de leur implantation sur le territoire national. Cela permet de réduire les tensions et les conflits politiques inutiles ».
« Si au bout de six ans, les togolais ont le sentiment que ça ne marche pas, ils peuvent désavouer leur Parlement. C’est beaucoup plus honnête, plus loyal, sain et démocratique », a-t-il précisé.
A en croire le ministre, « cette réforme procède du constat que la cristallisation autour de la fonction du président de la République, la concentration des pouvoirs entre les mains d’un seul homme ou d’une seule femme était de nature à fragiliser l’institution étatique ».
« Concrètement, l’État se retrouvait souvent affecté et désarticulé. Elle procède d’une conviction réelle des députés du parti UNIR (au pouvoir), qui ont souhaité que nous changions de modèle. Désormais, la magistrature suprême est, selon les termes de la nouvelle Constitution, vidée de sa substance puisque le nouveau président est privé de toute prérogative », a mentionné M.Bawara.
Le fait que l’opposition ait décidé de participer aux élections législatives du 29 avril, après avoir boycotté celui de 2018 « est déjà une bonne chose », a-t-il salué.
« À charge, aux candidats de l’opposition, de convaincre sur le terrain. L’occasion leur est donnée de faire de ces élections législatives et régionales un référendum pour ou contre la réforme constitutionnelle engagée. Ils ont l’opportunité d’aller vers nos concitoyens pour expliquer les raisons pour les lesquelles ils y sont opposés et ce qu’ils feront s’ils remportaient la majorité à l’Assemblée nationale », a-t-il indiqué.
La campagne électorale – démarrée le 13 avril – prendra fin le 27 avril. Ces élections législatives sont couplées avec les élections régionales, qui sont organisées pour la première fois au Togo. Au total 113 députés et 179 conseillers régionaux seront élus lors ces élections. FIN
Edem Etonam EKUE