Mgr Nicodème Barrigah-Benissan (Archevêque de Lomé) a invité les togolais à « retrouver le vrai sens du dialogue en acceptant les points de vue différents, divergents et parfois contrariants ».
Dans un message à l’occasion de la journée mondiale de la paix le 1er Janvier, le prélat a invité les togolais « à dialoguer dans le respect des personnes et de leur dignité mais dans la vérité, dialoguer même lorsqu’on a été blessé, dialoguer en apprenant de ses maladresses, dialoguer pour construire ensemble » le pays.
« Un tel dialogue ne doit pas se limiter à la sphère politique mais commencer dans nos familles pour s’étendre à nos écoles, quartiers, relations de travail, communautés de foi et associations. De fait, si nous n’apprenons pas à dialoguer à ces niveaux, il nous sera bien difficile de le faire par la suite dans le domaine politique », a-t-il enchaîné.
Selon lui, « les Togolais se sont trop mentis et trompés, ils ont souvent mené des +monologues à plusieurs voix+ sans trop chercher à bouger de leurs positions ».
« Malheureusement, nous le savons, tout peuple qui tourne le dos au dialogue s’engage dans une voie sans issue : celle de la force, de la violence et de l’oppression », a averti Mgr Barrigah-Benissan.
« Le Togo, notre Pays, tout au long de son histoire, a connu de nombreuses tentatives de dialogue qui, hélas, ont déçu nos attentes parce qu’elles ont été menées sans confiance et bonne foi entre les interlocuteurs », a-t-il déploré.
« Le premier chemin sur lequel le Saint Père nous invite à nous engager est celui du dialogue intergénérationnel pour la construction de la paix. Dialoguer est essentiel à toute vie sociale. Mais toute conversation n’est pas forcément un dialogue, car pour être sincère le dialogue +requiert toujours une confiance fondamentale entre les interlocuteurs+ Il consiste à +s’écouter, discuter, se mettre d’accord et cheminer ensemble+ », a-t-il indiqué.
Le dialogue, a-t-il poursuivi, « est donc une attitude fondamentale qu’il importe de promouvoir dans tous nos milieux de vie, cependant il existe un type de dialogue auquel le Pape attache une importance toute particulière : c’est le dialogue entre les générations ».
« Aujourd’hui, en effet, les personnes âgées se sentent de plus en plus seules, marginalisées et coupées du monde par une technologie qu’elles ne maîtrisent pas. Même dans leurs propres familles et maisons, elles sont de plus en plus ignorées et isolées. En réalité, écrit le Pape « les jeunes ont besoin de l’expérience existentielle, sapientielle et spirituelle des personnes âgées » tandis que « les personnes âgées ont besoin du soutien, de l’affection, de la créativité et du dynamisme des jeunes », a ajouté le Prélat.
Toujours dans son message, Mgr Barrigah-Benissan a également touché le secteur de l’éducation et a mis l’accent sur le « travail ».
Voici l’intégralité du reste du message du Prélat
L’Éducation
Voilà le deuxième chemin que propose le Pape pour la paix. Ici encore, le Saint Père commence par un triste constat : aujourd’hui, dit-il, nos Etats consacrent plus d’argent à préparer la guerre qu’à éduquer à la paix: «Ces dernières années, le budget consacré à l’éducation et à l’instruction, considérées comme des dépenses au lieu d’investissements, a été sensiblement réduit dans le monde entier. (…) Les dépenses militaires, en revanche, ont augmenté, dépassant le niveau enregistré à la fin de la +guerre froide+, et elles semblent devoir croître de manière exorbitante».
Voilà pourquoi le Pape invite chacun de nous, individus et États, à faire de l’éducation une priorité pour la paix. Il nous exhorte, sur ce plan, à ne pas confondre l’éducation avec l’instruction : l’instruction, c’est l’acquisition de connaissances grâce à l’enseignement. L’éducation, c’est d’abord le développement de la capacité d’être soi tout en étant avec les autres, à ménager ses relations avec eux, à participer à la vie sociale, à intérioriser la culture commune.
A juste raison, le Pape recommande aux Gouvernants de consacrer une bonne partie des sommes allouées indûment à l’achat des armes, au développement de l’instruction pour les jeunes et l’alphabétisation pour les adultes.
Mais il importe également que soient créées les conditions pour la formation de bons citoyens, à travers la transformation des cœurs, la formation des consciences et l’attachement au bien commun ; en d’autres termes, il importe de recourir à d’autres canaux d’éducation pour réussir un tel développement intégral.
Et c’est précisément à ce niveau que doit se situer la mission de l’Eglise : éduquer aux valeurs qui garantissent la croissance intégrale de la personne humaine.
Le travail
Tel est le troisième chemin que propose le Pape François : « Le travail est un facteur indispensable pour construire et préserver la paix. Il est expression de soi et de ses propres dons, mais aussi effort, fatigue, collaboration avec les autres, puisqu’on travaille toujours avec ou pour quelqu’un. Dans cette perspective fortement sociale, le travail est le lieu où nous apprenons à donner notre contribution pour un monde plus vivable et plus beau ».
« La pandémie de Covid-19, écrit le Pape, a aggravé la situation du monde du travail, qui affrontait déjà de multiples défis. Des millions d’activités économiques ont fait faillite ; les travailleurs précaires sont de plus en plus exposés ; beaucoup de ceux qui assurent des services essentiels sont davantage ignorés de la conscience publique et politique; (….). Les jeunes qui entrent sur le marché du travail et les adultes victimes du chômage font face aujourd’hui à des perspectives dramatiques ».
Afin que le travail contribue effectivement à la consolidation de la paix, le Pape François formule quelques propositions bien pertinentes inspirées par la Doctrine Sociale de l’Eglise.
Il recommande d’être prudents à l’égard de la technologie pour qu’en se servant d’elle pour améliorer la qualité du travail, l’on n’en vienne pas à la substituer à l’homme lui-même : « on ne doit pas chercher à ce que le progrès technologique remplace de plus en plus le travail humain, car l’humanité se dégraderait elle-même ».
Il exhorte également à « promouvoir dans le monde entier des conditions de travail décentes et dignes, orientées vers le bien commun et la sauvegarde de la création ».
Cela signifie qu’il faut veiller à ce que « le profit ne soit pas l’unique critère-guide » dans le domaine du travail.
Le Pape invite, enfin, à trouver « un juste équilibre entre liberté économique et justice sociale » afin que les industries et sociétés se soucient davantage des populations démunies qui ne bénéficient pas des avantages de leurs réalisations. Sans cet effort commun d’ »élaboration d’un pacte social», il est évident que « tout projet de paix est inconsistant ».
Notre pays réalise beaucoup d’efforts dans le domaine du travail et il convient de lui en savoir gré. Cependant, beaucoup de citoyens ne sentent pas d’amélioration dans leur vie quotidienne parce qu’ils n’ont pas de travail ou que leur occupation ne leur permet pas de gagner décemment leur vie.
Continuons donc d’œuvrer ensemble pour que chacun ait un travail ; que l’accès au travail ne soit pas conditionné par des facteurs discriminatoires et que l’exercice de ce droit fondamental soit plus décent et plus digne.
Chers frères et sœurs et vous tous, hommes et femmes de bonne volonté,
Au seuil de cette année, prenons la résolution de nous engager dans ces trois voies proposées par le Pape François en comptant sur la bénédiction de Dieu que j’invoque abondamment sur chacun de vous.
Bonne et Heureuse Année à vous ainsi qu’à tous les Togolais.
Edem Etonam EKUE