« Il faut soutenir les très jeunes entreprises africaines qui ont commencé à faire leurs preuves », c’est l’appel que lancent des acteurs sur le terrain, respectivement comme fondateurs d’entreprises et comme investisseurs pour la création d’un fonds de financement d’amorçage dédié aux start-up, TPE et PME à fort potentiel sur le continent.
Dans une tribune, ces responsables d’entreprises se réjouissent de la tenue du sommet sur le financement des économies africaines qui s’est tenu à Paris le 18 mai, pour la première fois. A cette occasion, les chefs d’Etat et les dirigeants d’organisations internationales ont placé tout en haut de leurs priorités, le soutien à l’entrepreneuriat africain comme moteur d’une croissance plus forte et plus inclusive.
« Nous nous réjouissons de cette reconnaissance au plus haut niveau », peut-on lire.
Les auteurs de cette tribune, proposent que « l’Alliance pour l’Entrepreneuriat en Afrique, annoncée à l’issue du sommet, soit complétée par la mise en place d’un fonds de financement d’amorçage pour que les promesses débouchent sur un soutien concret aux jeunes entreprises africaines ».
Ils font le constat selon lequel, tout projet entrepreneurial est amorcé par une forme de financement que l’entrepreneur réunit rapidement pour donner vie à son entreprise.
C’est généralement son propre argent, celui de ses proches ou, dans les économies matures, celui qui provient d’acteurs dédiés à ces toutes premières phases de vie de l’entreprise (business angels, bourses des incubateurs, etc.). Du fait même du stade de maturité des économies africaines, ces ressources d’amorçage manquent, ce qui explique la stagnation de nombreux projets viables qui auraient pu donner le jour à des entreprises prospères et créatrices d’emplois pérennes.
C’est pourquoi nous appelons à la création d’un fonds soutenant des très jeunes entreprises qui ont commencé à faire leurs preuves et à démontrer leur potentiel, même si elles sont encore très risquées.
Start-up, TPE et PME contribuent à la résolution des problématiques sociales
Il est difficile d’exagérer les multiples bienfaits de la révolution entrepreneuriale africaine. Depuis vingt ans est apparue toute une génération de start-up, TPE et PME qui ont fait la preuve de leur utilité publique.
« Un grand nombre de ces entreprises, parce qu’elles répondent à des besoins essentiels de leurs clients (se nourrir, se loger, se soigner, se former…), contribuent à la résolution de problématiques sociales ou sociétales », rappellent les auteurs. Qu’il s’agisse d’unités agroalimentaires structurant des chaînes d’approvisionnement auprès de paysans et faisant tourner de petites usines pour apporter des produits locaux transformés aux clients urbains (yaourts, pain, riz, jus de fruits…), de cliniques privées, d’entreprises offrant un accès à l’électricité dans les zones rurales, d’acteurs du BTP ou d’écoles privées ces entreprises, tout en poursuivant leurs objectifs commerciaux, créent des emplois, des débouchés pour leurs fournisseurs et une offre de produits locaux fiables », font remarquer les signataires.
En outre, les entrepreneurs jouent un rôle essentiel dans la grande transformation africaine en cours, ce long cycle de progrès économiques, parfois chaotiques, et de transition démographique, souvent atypique, qui suscite l’émergence d’une classe moyenne populaire.
La révolution entrepreneuriale africaine est un phénomène de long terme, sur lequel les chefs d’Etat ont raison de miser.
Certes, les acteurs publics africains comme internationaux n’ont pas attendu ce sommet pour mettre en œuvre des mesures d’appui à l’entrepreneuriat africain, sur des plans essentiels : politique de formation professionnelle, investissement dans les infrastructures, facilitation et digitalisation des démarches administratives…
Mais beaucoup reste à faire, y compris la lutte contre l’arbitraire fiscal et contre les retards de paiements…des administrations elles-mêmes. Depuis une dizaine d’années, la puissance publique apporte aussi son soutien à des initiatives privées de financement des PME africaines.
L’alliance pour l’entrepreneuriat en Afrique, une occasion unique
L’alliance pour l’entrepreneuriat en Afrique représente une occasion unique d’aller plus loin, particulièrement sur le plan du financement des entreprises, frein constamment cité par les entrepreneurs. En particulier, le fonds de financement d’amorçage que nous appelons de nos vœux s’inspirerait de l’expérience réussie de quelques acteurs de terrain et se fixerait comme objectif de financer, en cinq ans, 500 entreprises réparties dans au moins 20 pays africains (incluant des pays fragiles souvent délaissés, notamment au Sahel), pour des montants par entreprise compris entre 20 000 et 100 000 euros.
Ce fonds s’adresserait aussi bien à des start-up technologiques qu’à des entreprises plus «traditionnelles» en phase amont (transformation agroalimentaire, services aux particuliers et aux entreprises, transport, formation, cabinets médicaux, secteur manufacturier léger, pharmacie, etc.).Il toucherait aussi de nombreuses femmes entrepreneures talentueuses, tant il est vrai que, malheureusement, on les rencontre peu dans le cercle restreint des grandes entreprises.
Les financements pourraient prendre la forme de prêts d’honneur. Les dirigeants d’entreprises seraient sélectionnés et accompagnés par des équipes spécialisées et indépendantes des administrations publiques, mal outillées pour dialoguer avec de très petites structures.
A un horizon de trois ans, on peut s’attendre à ce que la moitié des entreprises accompagnées aient atteint une première maturité, pouvant alors s’inscrire dans une trajectoire de développement de long terme, et utiliser d’autres outils de financement et d’accompagnement comme les fonds PME déjà évoqués.
Yves T. AWI Source: (Le Monde Afrique)