Deux nouvelles lois récemment adoptées par le Parlement sénégalais pour renforcer la lutte contre le « terrorisme » font peser un risque sur la protection des libertés fondamentales au Sénégal, a averti lundi l’ONG Human Rights Watch (HRW).
Dans un communiqué, Human Rights Watch qualifie la nouvelle législation de « vague ». Elle pointe le risque qu’elle soit « utilisée pour criminaliser les activités politiques pacifiques et porter atteinte à la liberté d’association et de réunion ».
Si l’ONG estime « légitimes » les « inquiétudes (…) au sujet de l’influence croissante des groupes armés islamistes au Sénégal », elle juge que les autorités sénégalaises devraient « s’assurer que ces lois ne sont pas instrumentalisées pour supprimer les droits fondamentaux », a déclaré l’une de ses chercheuses, Ilaria Allegrozzi.
« Le gouvernement devrait renvoyer les deux lois au Parlement pour amender les dispositions problématiques », a ajouté Mme Allegrozzi, citée dans le communiqué, alors que le Conseil constitutionnel sénégalais doit se prononcer sur un recours en annulation introduit fin juin par 21 députés d’opposition.
En s’attaquant notamment « à la piraterie maritime », au « financement du terrorisme » et au « blanchiment », la réforme du code pénal et du code de procédure pénale apporte une réponse aux risques d’extension au Sénégal des violences jihadistes qui ensanglantent depuis des années les pays du Sahel comme le Mali et le Burkina Faso, a justifié le gouvernement sénégalais.
Adoptés au Parlement le 25 juin par 70 voix contre 11, les deux textes doivent encore être promulgués par le président Macky Sall avant d’entrer en vigueur, à une date qui n’a pas été précisée. Un collectif de partis d’opposition et d’associations de la société civile avait organisé des manifestations le jour de leur adoption, en qualifiant ces textes de « liberticides ».
Une vingtaine de personnes avaient été interpellées et brièvement détenues. L’enjeu est que « le président Macky Sall veut briguer un troisième mandat (alors que le nombre de mandat est limité à deux par la Constitution) et qu’il veut mettre des garde-fous » pour empêcher les gens de manifester, a affirmé à cette occasion le député d’opposition Toussaint Manga.
Elu en 2012 et réélu en 2019, Macky Sall entretient le flou sur ses intentions pour la présidentielle de 2024, mais il sillonne le pays depuis des semaines dans ce qui a pris les allures d’une vaste tournée pré-électorale.
Source : AFP