Burkina: 46 morts dans des affrontements intercommunautaires

Les représailles contre les peuls qui ont fait une quarantaine de morts cette semaine au Burkina Faso après l’attaque meurtrière d’un village réveillent les griefs contre la communauté peule accusée, comme au Mali voisin, de collusion avec les jihadistes.

Comme au Mali, au Niger ou au Nigeria, les tensions dégénèrent périodiquement en violences entre Peuls, traditionnellement éleveurs souvent nomades et musulmans présents dans toute l’Afrique de l’Ouest, et autochtones agriculteurs.

Certains membres de la communauté peule ont rejoint des groupes jihadistes qui depuis le Mali se sont propagés notamment au Burkina Faso, donnant prétexte à des représailles sanglantes sur fond de conflits terrestres intercommunautaires.

A peu près au même moment en ce début d’année, deux raids meurtriers ont touché cette communauté. Au Mali, l’attaque menée contre un village par des chasseurs traditionnels dozos a fait 37 morts mardi. Au Burkina, au moins 46 civils ont été tués entre mardi et mercredi après l’attaque du village de Yirgou (centre) attribuée aux jihadistes.

« Dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier, au village de Yirgou-Foulbè, dans la commune de Barsalogho, région du centre nord, des terroristes ont tué sept personnes dont le chef de village avant de prendre la fuite », a expliqué vendredi porte-parole du gouvernement, Remis Fulgance Dandjinou.

Les jours suivants, « la poursuite des terroristes par les populations a eu pour conséquence des exactions et des pertes en vies humaines au sein de la communauté peule dans différentes localités de cette région », a-t-il ajouté.

Le bilan provisoire a été revu à la hausse pour s’établir à 46 morts, a-t-il dit.

Un précédent bilan établi par des sources sécuritaires et locales faisait état de 13 morts.

La communauté peule est soupçonnée par la communauté Mossi, majoritaire au Burkina, d’être en intelligence avec les « terroristes ».

« Un des objectifs recherchés par les terroristes est de porter atteinte à la cohésion nationale », a estimé le porte-parole du gouvernement également ministre de la Communication. « Il faut ramener le calme au sein de nos communautés ».

Il a indiqué que les autorités avaient pris « des mesure sécuritaires très strictes » pour protéger les populations, poursuivre les responsables, ramener le calme et « porter assistance aux personnes qui, par crainte, ont quitté leur localité dans des conditions difficiles ».

Deux actions judiciaires sont en cours, a-t-il expliqué, l’une « liée aux assassinats du chef de Yirgou et des six autres victimes par les terroristes », l’autre pour déterminer les responsables de « ces attaques qui ont abouti à des pertes en vie humaine dans différents villages et qui ont touché essentiellement la communauté peule de ces localités ».

Lundi, le président burkinabé Roch Marc Christian Kaboré a décrété l’état d’urgence dans plusieurs régions du pays pour contrer la menace terroriste des islamistes armés.

Le Burkina Faso est confronté depuis trois ans à des attaques de plus en plus fréquentes et meurtrières. D’abord concentrées dans le nord du pays, elles se sont ensuite étendues à d’autres régions dont celle de l’Est, frontalière du Togo et du Bénin.

Les attaques attribuées notamment aux groupes jihadistes Ansaroul Islam et Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) ont fait plus de 270 morts depuis 2015. Ouagadougou, la capitale, a été frappée à trois reprises.

Au Mali voisin, les jihadistes ont été en grande partie chassés du nord du pays ou dispersés dans les autres pays de la région à la suite du lancement en

janvier 2013, à l’initiative de la France, d’une intervention militaire qui se poursuit.

Mais depuis l’apparition il y a quatre ans dans le centre du pays du groupe jihadiste du prédicateur peul Amadou Koufa (tué fin novembre dans une opération militaire française soutenue par l’armée malienne, selon Paris et Bamako), les violences se multiplient de la même façon entre les Peuls et les ethnies bambara et dogon.

Ces violences intercommunautaires y ont fait plus de 500 morts civils en 2018, selon l’ONU.

SOURCE : AFP