Multiples ventes et spoliation foncière ou de titre de propriété volé ou falsifié par-ci, occupation anarchique de réserves administratives par-là : les problèmes liés au foncier sont récurrents ces dernières années au Togo.
A plusieurs reprises, les médias ont relayé des manifestations parfois violentes dans certaines localités, occasionnant des pertes en vies humaines.
Conscient de l’allure inquiétante que prennent les événements enregistrés, l’Etat a décidé de prendre le taureau par les cornes, d’où la tenue du forum national dur le foncier ouvert ce mardi par le Premier ministre togolais Selom Komi Klassou.
Étaient présents à l’ouverture des travaux, les présidents des institutions de la République, ainsi que d’anciens Premiers ministres.
Thème retenu pour ce conclave de quatre jours : « une gouvernance foncière inclusive pour un développement durable : le temps de l’action ».
Prennent part aux travaux, des acteurs de l’administration publique, les présidents de délégations spéciales, des chefs traditionnels et des représentants du corps judiciaire et des collectivités territoriales.
Des forces de sécurité, des partenaires techniques et financiers ainsi que plusieurs experts nationaux et internationaux (venus de pays amis), mais aussi d’institutions spécialisées dans les questions foncières, sont également invités à ce grand forum.
« Nous devons nécessairement mettre en place des règles de procédures adéquates, histoire de faciliter l’accès à la propriété et de garantir la sécurité foncière », a déclaré l’Agence Savoir News Alain Gandji, spécialiste des questions foncières.
Selon certains spécialistes, il est temps que le Togo se dote d’un code foncier qui tient compte des réalités socio-économiques de l’heure.
Un avant-projet de texte existe déjà, document ayant fait l’objet de validation au niveau des régions et de validations sectorielles. Mais il est grand temps qu’ils soit réexaminé.
Les litiges fonciers « asphyxient » de plus en plus l’économie nationale
« Le thème de ce forum est éloquent, parce que nous voulons passer à l’action. Nous voulons creuser et voir si les dispositions de cet avant projet de code foncier prennent en compte toutes les préoccupations des citoyens et des enjeux de développement économique. Nous allons revisiter ce code et mener un regard croisé sur ce code pour voir si le code peut être un vecteur de développement économique, de cohésion social et de paix », a souligné Me Fiatuwo Kwadjo Sessenou, ministre de l’urbanisme, de l’habitat et du cadre de vie.
« Les litiges fonciers asphyxient de plus en plus l’économie du pays », a reconnu le ministre.
« Aujourd’hui nul ne peut nier l’importance des femmes dans tous les secteurs d’activités donc il va falloir que le code foncier prenne en compte le droit d’accès à la terre des femmes en matière de partage et de l’égalité dans le partage », a ajouté Me Sessenou.
Depuis 1906, le Togo ne dispose plus d’aucun texte en matière de gouvernance foncière, ce qui a conduit le gouvernement à initier en 2013 les états généraux du foncier, initiative visant à assainir le secteur. Mais, force est de constater qu’à ce jour aucun texte national ne régit le foncier, qui demeure une des principales sources de conflits entre communautés.
« Les litiges fonciers deviennent de plus en plus difficiles à gérer et ce forum selon moi, doit permettre à de définir ses responsabilités. Auparavant nous réglions ces litiges avec certaines méthodes qui ont disparues aujourd’hui avec les droits de l’homme », a confié chef traditionnel, invité à ce forum.
« Donc aujourd’hui nous avons besoin de savoir où en est exactement le Togo dans le règlement des litiges fonciers », a-t-il martelé.
Des réformes « urgentes et courageuses »
Le foncier a toujours été sujet à conflit dans toutes les communautés humaines et tend à compromettre dangereusement la sérénité, la paix et le développement.
Selon certains observateurs, des conflits fonciers constituent des bombes à retardement dans plusieurs pays de la sous-région.
« La thématique du foncier est donc majeure. Elle est sensible. Presque tous les citoyens sont, à un titre ou à un autre, concernés par la question foncière. Elle est complexe mais pas insoluble. Aujourd’hui dans notre pays, les litiges fonciers résultent de plusieurs causes, les unes aussi complexes que les autres », a souligné le Premier ministre.
Raison pour laquelle, le sujet doit être abordé « avec hauteur, responsabilité et esprit du bien commun ».
« Face à la pression démographique de plus en plus forte et les besoins fonciers liés à une telle dynamique, il nous faut opérer des réformes urgentes et courageuses afin de finir avec la précarité des droits qui engendre l’insécurité foncière et constitue à la fois une contrainte majeure à la croissance économique pour enfin asseoir les propriétaires et les tiers acquéreurs légaux dans la plénitude du droit de propriété.
M. Klassou a surtout invité les participants à ce forum à réfléchir sur une politique foncière « adaptée à la société togolaise avec l’apport des pratiques d’ici et d’ailleurs et affermir les textes en projets pour une gouvernance foncière ambitieuse et volontariste ».
Pour ces quatre jours de discussions, il est prévu cinq panels dont les causes de l’insécurité foncière au Togo, le cadre juridique et institutionnel du foncier au Togo et le mode d’accès à la propriété foncière. Certains pays notamment le Bénin, le Sénégal et le Maroc et le Cameroun sont invités à ce forum pour partager leurs expériences avec l’assistance. FIN
Chrystelle MENSAH/ Rédaction
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