Bénin/ Affaire de cocaïne: « Le pouvoir béninois a voulu m’humilier parce que je deviens trop gênant » (Sébastien Ajavon)

L’homme d’affaires Sébastien Ajavon a vertement accusé le pouvoir en place de voulu m’humilier dans le dossier des +18 kg de cocaïne+, parce qu’il devient « trop gênant ».

« Le Bénin n’est pas une plaque tournante du trafic de drogue. On ne peut pas ternir l’image de notre pays juste parce qu’on veut ternir l’image de Sébastien Ajavon qui devient gênant en politique », a déclaré M.Ajavon dans une interview au site du journal Le Monde.

Environ 18 kg de cocaïne avaient été découverts dans la nuit du 27 au 28 octobre au port autonome de Cotonou, dans un conteneur en provenance de l’Amérique Latine, appartenant à la Société Cajaf Comon de M. Ajavon. Montant approximatif de la drogue saisie (selon la gendarmerie) : 9 milliards de F.CFA.

Interpellé, l’homme d’affaires a été relaxé au « bénéfice du doute », une semaine après avoir été jugé.

Le Tribunal avait prononcé sa relaxe pour « insuffisance de preuve ». Trois de ses collaborateurs également interpellés dans ce dossier, ont été libérés.

« C’est un coup qui a été monté pour ternir mon image. La drogue ne fait pas de riches au Bénin. Les Béninois n’ont même pas les moyens d’en consommer, encore moins de la cocaïne. La drogue, c’est pour les petits dealers. Moi je suis dans le secteur de l’agroalimentaire et des produits congelés. Ces deux choses ne vont pas de paire. Tous ceux qui font le vingtième du volume du groupe Cajaf-Comon sont milliardaires. Ont-ils fait eux aussi de la drogue ? Les Béninois savent que c’est une machination », a dénoncé M. Ajavon.

« On m’avait dit qu’en politique, on pouvait faire des coups tordus, mais j’ignorais que cela pouvait aller si loin. Cela fait sept mois à peine que le nouveau chef de l’Etat a pris ses fonctions et c’est avec notre concours qu’il est arrivé aux affaires. Peut-être que je deviens trop gênant. Donc il faut m’éliminer tout de suite pour que je ne sois plus important dans l’arène politique. Au temps du président Thomas Boni Yayi, il y avait déjà des menaces. Mais ils n’ont jamais osé violer des conteneurs pour y mettre des stupéfiants », a-t-il indiqué.

Classé parmi les richissimes hommes d’affaires du pays, M. Ajavon était candidat à la présidentielle de mars 2016. Arrivé en troisième position, il avait fortement contribué à l’élection du président Patrice Talon pour l’avoir soutenu au second tour.

Réagissant par rapport au silence du gouvernement durant la procédure, l’homme d’affaires a simplement affirmé: « C’est de l’hypocrisie. Le parquet est sous la tutelle du ministère de la justice et des instructions ont été données. Sinon, on ne pouvait pas me garder pendant tout ce temps. Sept jours, c’est énorme ! Sur le plan pénal, la responsabilité est personnelle mais aucune enquête préalable n’a pas été faite. Nous n’étions même pas encore entrés en possession de nos commandes. On pouvait juste me convoquer pour faire la lumière sur ce qui s’est passé ».

Ses relations avec Patrice Talon

« Nous avions de très bonnes relations. Si nous n’étions pas d’accord sur certains dossiers, je le lui disais. Parfois, il en tenait compte. C’est lui le président de la République. C’est lui qui prend les décisions en dernier ressort. Tout se passait bien. Tant qu’on n’aura pas sanctionné ceux qui ont monté cette cabale pour ternir mon image, je ne serai pas content. C’est le président de la République seul qui peut sévir », a souligné M. Ajavon.

Ce dernier a reproché au président de n’avoir pas tenu ses promesses : « Nous avons un accord formel et bien écrit qui n’a pas été respecté : nous devions obtenir le tiers des postes ministériels. Nous n’avons eu que trois petits ministères [agriculture, enseignement secondaire, économie numérique], qui sont gérés depuis la présidence. Pour moi, ce n’est pas une bonne collaboration ».

Mais, M. Ajavon n’entend pas intimer l’ordre à ses ministres de démissionner: Ils ne dépendent plus vraiment de moi. C’est à eux de savoir s’ils doivent démissionner ou pas ».

« Je ne serai ni de près ni de loin mêlé à la gestion du pouvoir de M. Talon. Je m’éloigne de la gestion du pouvoir. Je ne sais pas s’il faut l’appeler cela de l’opposition. Je me mets à l’écart. Cela ne veut pas dire que je vais critiquer systématiquement tout ce que Patrice Talon fera. Si ce sont de bonnes choses, je le dirai, sinon, je le dénoncerai », a-t-il précisé.

Vendredi, le président Talon n’a pas passé sous silence ce dossier, lors de sa tournée dans le septentrion.

« Est ce que nous sommes prêts à lutter contre l’impunité ? J’ai pas l’impression, parce qui il y a eu des événements qui se sont passés il y a pas longtemps, il y a quelque jours. J’ai vu combien j’ai reçu la pression de mes concitoyens : de beaucoup d’autorités politiques, morales, de grandes personnalités pour consacrer ce qui n’est pas admis », avait-il affirmé.

« Si publiquement, les péchés deviennent des actions de gloire – je pèse mes mots -, si chaque fois que quelqu’un doit faire un péché et ne sera pas capable d’apprécier que c’est un péché et que c’est au contraire une action de gloire, c’est dangereux pour le pays », avait-il dénoncé.

« Il est important pour nous, que publiquement, nous ayons au moins la mesure, le courage, de ne pas faire l’apologie du péché parce que après, il n’y a plus de repère », avait lancé M.Talon, sans clairement affirmer si M.Ajavon est trempé dans ce dossier. FIN

Cotonou, Lucia Fèmi SIMON

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