Les relations de coopération et d’amitié entre le Togo et la Chine « sont excellentes et particulièrement denses », a affirmé le chef de l’Etat togolais Faure Gnassingbé dans une interview à l’Agence Chine Nouvelle.
Le président togolais se prépare à se rendre en Chine pour une visite de quatre jours. C’est la deuxième fois qu’il se rendra dans ce pays.
« En premier lieu, il s’agit de répondre à une invitation du Président de la République Populaire de Chine. Je voudrai l’en remercier. Je voudrai dire également pour citer feu le Président Gnassingbé Eyadéma que +Là où votre cœur est, les pieds n’hésitent pas à aller+ », a souligné Faure Gnassingbé.
« Ensuite, vous savez mieux que moi que, sur le plan géographique, la Chine est un pays-continent. Il est donc très vaste et il faut plusieurs visites pour découvrir ne serait-ce que quelques aspects essentiels. Ceci sans parler de l’immensité de votre culture.
Comme je le disais tout à l’heure, le rôle de la Chine dans la mise en œuvre de la stratégie de développement du Togo prend de plus en plus d’importance », a-t-il ajouté. FIN
Voici l’intégralité de l’Interview du président Faure Gnassingbé.
Question: Excellence Monsieur le Président, votre prédécesseur feu Gnassingbé Eyadéma avait effectué cinq visites en Chine et échangé avec les leaders Mao Zedong, Deng Xiaoping et Jiang Zeming. Quelles sont vos impressions sur notre amitié traditionnelle ?
Faure Gnassingbé: Le 25 octobre 1971, le Gouvernement Togolais a reconnu la République Populaire de Chine en votant à l’ONU, à New York, avec de nombreuses nations, pour l’entrée de la Chine à l’Organisation des Nations Unies. La République Populaire de Chine avait été ainsi et à juste titre instaurée dans ses droits, en devenant, ipso facto, le Représentant légitime du peuple chinois. Etait-il, en effet, réaliste de ne pas le faire ?
Le Togo pouvait-il continuer à l’époque à ignorer dans le concert des Nations, la voix d’un peuple représentant près du quart (1/4) de l’humanité ? Non. Le Togo avait, donc, vu juste en votant dans le sens de la sagesse.
Le 19 septembre 1972, la Chine et le Togo établirent, formellement leurs relations diplomatiques avec accréditation d’Ambassadeurs Extraordinaires et Plénipotentiaires dans les deux capitales, Beijing et Lomé.
Les peuples chinois et togolais ont, dès lors, contracté une amitié solide caractérisée par la communauté d’idée, de destin et de cœur.
De 1972 à ce jour, il est très réconfortant de constater que le Togo et la Chine continuent d’entretenir une amitié sincère, fruit des nombreux échanges qu’ont eus nos prédécesseurs, Dirigeants d’Etat des deux pays, dont Mao Zedong, Zhou-En-Lai, Deng Xiaoping, Jiang Zeming et Gnassingbé Eyadéma.
Nous apprécions donc, hautement, cette amitié traditionnelle qui lie la Chine et le Togo mais aussi les deux peuples frères, amitié que nous avons le devoir et la responsabilité de promouvoir davantage, dans l’intérêt des deux Parties.
Comment sont aujourd’hui les relations de coopération et d’amitié entre votre pays et la Chine ?
Elles sont excellentes et particulièrement denses. Depuis la première visite du Président Gnassingbé Eyadéma en République Populaire de Chine, en septembre 1974, une coopération politique, économique et technique appréciable s’est de plus en plus développé entre nos deux pays.
Sur le plan politique la Chine et le Togo ont les mêmes vues sur les grands problèmes internationaux et se soutiennent mutuellement sur la scène internationale. Il en a été ainsi lors du mandat du Togo au Conseil de Sécurité en 2012-2013 et, présentement, au Conseil des droits de l’Homme où mon pays siège depuis le début de cette année. Nos deux pays se consultent régulièrement sur le plan politique afin d’échanger les vues sur les sujets importants du moment.
Ce qui permet au Togo de réaffirmer sa politique d’une seule Chine mais aussi d’appeler à un rôle accru de la Chine dans la résolution des conflits internationaux. A cet égard, nous allons signer une convention instaurant un mécanisme de consultation entre nos deux Pays couronnant ainsi la proximité politique entre nous qui est fondée sur deux principes : la confiance et le respect mutuels.
D’importants Accords et Protocoles constituant les fondements juridiques de la coopération entre les deux (2) pays ont été signés.
Les réalisations de cette coopération sont remarquables tant dans les domaines politique, culturel et éducatif que dans les domaines économique et social.
En ce qui concerne la coopération économique, technique, financière et socioculturelle, des réalisations mutuellement bénéfiques aux parties ont été enregistrées
La coopération sino-togolaise, touche plusieurs domaines et a, pour objectif essentiel, d’aider le Togo à devenir de plus en plus autonome, sur tous les plans, et à tendre résolument vers l’émergence.
Les investissements chinois dans la santé, l’agriculture, le commerce, la culture, les infrastructures, routières, portuaires, aéroportuaires, etc… procurent beaucoup d’emplois, à la jeunesse et contribuent également à la formation de techniciens et d’ouvriers qualifiés.
Sur le plan commercial, un accord intervenu entre les deux parties permet l’application réciproque de la clause de la nation la plus favorisée dans les relations commerciales entre les deux pays. Ainsi, les produits chinois, couvrant une gamme très variée sont importées au Togo et sont généralement à la portée de toutes les bourses. De même, des produits togolais peuvent rentrer sur le territoire Chinois sans subir des tarifications douanières à l’entrée.
D’une façon générale, les relations d’amitié et de coopération sino-togolaises contribuent à l’amélioration du niveau de vie de la population et nous en sommes très satisfaits. Cependant, il faut noter que le niveau de l’appui économique et technique de la Chine au Togo a monté d’un cran ces dernières années avec les investissements massifs intervenus dans le domaine des infrastructures. La Chine est non seulement le premier fournisseur du Togo mais également l’un des plus gros contributeurs en matière d’aide depuis 2008.
Aujourd’hui, vous projetez d’effectuer une visite d’Etat en Chine que vous avez déjà visitée. Qu’est-ce qui motive, essentiellement, cette nouvelle visite ?
En premier lieu, il s’agit de répondre à une invitation du Président de la République Populaire de Chine. Je voudrai l’en remercier. Je voudrai dire également pour citer feu le Président Gnassingbé Eyadéma que «Là où votre cœur est, les pieds n’hésitent pas à aller». Nous nous sentons bien ici en Chine, nous sommes heureux d’y revenir autant que possible.
Ensuite, vous savez mieux que moi que, sur le plan géographique, la Chine est un pays-continent. Il est donc très vaste et il faut plusieurs visites pour découvrir ne serait-ce que quelques aspects essentiels. Ceci sans parler de l’immensité de votre culture.
Comme je le disais tout à l’heure, le rôle de la Chine dans la mise en œuvre de la stratégie de développement du Togo prend de plus en plus d’importance. Lors des entretiens que j’ai eus avec le Président Xi Jinping en décembre dernier en marge du sommet Chine-Afrique, nous avons évoqué quelques grands sujets d’intérêt commun pour nos deux pays que nous allons approfondir ensemble. Cette visite nous donnera l’occasion de découvrir quelques grandes réalisations de la Chine dont nous pourrions nous inspirer.
Lors du dernier sommet de Johannesbourg du Forum de Coopération Chine-Afrique, la Chine a réaffirmé son engagement de contribuer au développement économique en Afrique. Le Togo a accéléré, depuis bientôt 10 ans, ses efforts de devenir un pays émergent et a misé sur la réalisation d’une politique de développement.
Quel rôle la Chine joue-t-elle déjà dans cette perspective et quel autre rôle souhaiteriez-vous voir la Chine jouer ?
La Chine s’est engagé à jouer un rôle clé dans la transformation structurelle de l’économie Africaine et le Togo a beaucoup d’atouts pour servir de porte d’entrée de l’Afrique de l’Ouest pour nos partenaires d’une manière générale et pour nos partenaires chinois en particulier.
A l’avenir, comme c’était le cas pendant les dix dernières années, le Togo souhaite vivement que la Chine renforce son appui en matière de construction d’infrastructures économiques notamment les routes, les chemins de fer, les infrastructures portuaires et aéroportuaires etc.
C’est une condition nécessaire pour permettre à notre pays dedévelopper un corridor logistique permettant de renforcer la compétitivité du Togo en matière de facilitation commerciale particulièrement vers les pays de l’hinterland et de faire du pays, un hub de logistique pour l’Afrique de l’Ouest.
Le Togo entend être le point d’ancrage en Afrique de l’Ouest du projet de la nouvelle route de la soie promu par la Chine et qui repose sur les liens entre les pays à travers des infrastructures terrestres et maritimes.
Nous souhaitons aussi que le Togo bénéficie davantage du concours de la Chine pour développer son agriculture qui reste le premier secteur porteur de croissance inclusive.
Mais le Togo envisage aussi de bâtir un tissu industriel digne de ce nom notamment l’agro-industrie avec pour objectif primordial de transformer les matières premières locales pour leur conférer plus de valeur ajoutée et, par conséquent assurer plus de revenus aux populations. A cet effet, le Togo souhaiterait bénéficier de transferts de technologie dans le domaine de la mécanisation agricole ainsi que de la délocalisation d’industrie dans le domaine du textile.
Par ailleurs, le Togo et la Chine continueront de coopérer étroitement dans le domaine des nouvelles technologies. Plusieurs projets sont en cours et d’autres suivront certainement.
Mais ce sur quoi je voudrais attirer l’attention c’est qu’il ne s’agit pas seulement de faire plus. Il s’agit de faire mieux et d’innover dans nos relations. Nous savons que le monde est confronté à un ralentissement économique dont les effets ne sont pas encore totalement cernés, notamment en matière de capacité budgétaire des Etats à impulser seuls le processus de transformation structurelle des économies. .
C’est pour cela que nous sommes convaincus que notre coopération, si elle repose sur l’engagement politique des Etats, doit désormais passer par une imbrication des secteurs privés qui seront les véritables catalyseurs des grands projets structurants pour l’avenir.
Je serai accompagné dans le cadre de cette visite d’Etat de plus d’une trentaine d’opérateurs économiques qui participeront au forum économique consacré au Togo. Nous sommes désormais à un tournant qui sera décisif si le secteur privé se mobilise effectivement. A nous les gouvernements de savoir les accompagner et leur inspirer confiance.
Quels sont les secteurs prioritaires que vous souhaitez pour la coopération sino-togolaise et les investissements chinois dans votre pays au cours des prochaines années
La réponse à cette question transparaît déjà dans mes propos précédents. Vous comprendrez bien que les secteurs prioritaires sont les infrastructures d’une manière générale à savoir les routes, les chemins de fer, les ports, les aéroports, l’énergie et les télécommunications ; l’agriculture ; l’industrie ; les services et plus particulièrement le secteur touristique ainsi que le commerce.
La Chine investit déjà beaucoup dans ces domaines mais nous souhaitons un accroissement des investissements et des transferts de compétences à la hauteur des besoins présents et futurs de notre économie, surtout dans le cadre d’un partenariat public-privé qui permette à nos entreprises privées de devenir plus performantes et à l’Etat d’être encore plus stratège.
Monsieur le Président, l’insécurité grandissante et le terrorisme sont des défis majeurs pour tous les Etats aujourd’hui. Votre pays en fait une grande préoccupation en Afrique de l’Ouest, surtout dans le secteur maritime. Quelle est votre vision et quels sont vos souhaits sur une coopération sino-africaine et sino-togolaise là-dessus ?
Notre vision est que le phénomène du terrorisme et de l’insécurité grandissante soit réglé dans le cadre d’une coopération internationale renforcée. C’est pour cela que, malgré ses moyens limités, le Togo est toujours présent aux côtés des pays frère d’Afrique qui connaissent des conflits armés. Le Togo, dans ce sens soutient la création d’une force en attente en Afrique avec l’appui de la communauté internationale.
Mais, comme vous le dites si bien, notre pays soutient plus particulièrement la lutte contre l’insécurité maritime comme un moyen de protéger le commerce international car, 90% du commerce de marchandise passe par la mer.
C’est pour cela que notre pays a proposé la tenue d’une conférence internationale sur la sécurité maritime qui se tiendra en octobre 2016 à Lomé. L’un des objectifs de ce sommet est de parvenir à une convention internationale sur la sécurité maritime pour mieux sceller l’engagement de tous les Etats à combattre l’insécurité maritime qui menace dangereusement la paix et la sécurité mondiale, mais aussi le progrès économique recherché en Afrique pour améliorer les conditions de vie des populations.
La Chine en tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies a un rôle crucial à jouer pour préserver la paix et la sécurité à l’échelle mondiale et nous pensons qu’elle le joue déjà bien.
Nous voudrions saisir l’occasion de cette interview pour remercier à nouveau le Gouvernement Chinois pour tout l’appui logistique apporté au Gouvernement Togolais pour la bonne tenue du sommet sur la sécurité maritime. FIN
Source : Xinhua