Niger: Le président sortant Issoufou contraint à un second tour

Le chef de l’Etat nigérien sortant Mahamadou Issoufou a échoué vendredi à être réélu dès le premier tour de la présidentielle et devra affronter l’opposant Hama Amadou, pourtant emprisonné, lors d’un second tour inédit.

Le président Issoufou, 63 ans, qui briguait un deuxième mandat de cinq ans et avait promis une victoire par « KO », a obtenu 48,41% des suffrages, selon les résultats annoncés par la Commission électorale nationale indépendante (Céni).

Hama Amadou, un ancien Premier ministre passé à l’opposition et incarcéré depuis novembre 2015 dans un dossier controversé de trafic d’enfants, est arrivé deuxième en recueillant 17,41% des voix. Le second tour devrait avoir lieu fin mars.

Deux autres principaux opposants se présentaient pour le scrutin. L’ancien Premier ministre Seini Oumarou a obtenu 12,11% des voix et l’ancien président Mahamane Ousmane 6,25%.

Le taux de participation a été de 66,75% avec 4,8 millions de suffrages exprimés sur 7,5 millions d’électeurs inscrits, selon la Céni.

Le président sortant, à qui il a manqué 167.000 voix pour être réélu dès le premier tour, devra faire face à une opposition qui avait promis de s’unir au second tour. Mais M. Amadou devra bénéficier de très bons reports de voix pour pouvoir succéder à M. Issoufou.

Surnommé « le Lion », M. Issoufou a affirmé lors de la campagne avoir tenu toutes les promesses faites en 2011 pour sa première victoire. Il avait notamment souligné avoir fait gagner 35 places au pays dans l’indice de perception de la corruption (89e en 2015 contre 134 en 2010). Les accusations de corruption du régime sont justement le principal cheval de bataille de l’opposition.

Le Lion contre le Phénix

Quinze candidats étaient en lice pour présider ce pays de 18 millions d’habitants parmi les plus pauvres de la planète et vivant sous la menace des groupes jihadistes sahéliens et des islamistes nigérians de Boko Haram.
Le vote, couplé à des législatives, s’est déroulé sur deux jours, dimanche et lundi, en raison d’importants retards dus notamment à des problèmes de logistique.

En août 2014, alors président du Parlement, Hama Amadou avait quitté le pays après avoir perdu son immunité parlementaire dans une affaire de trafic international présumé de bébés entre le Nigeria, où ils ont été conçus, le Bénin et le Niger.

Il a été incarcéré à son retour d’exil à la mi-novembre et n’a pas pu sortir de prison ou s’adresser publiquement à ses partisans comme le prévoit la loi électorale.

Surnommé « le Phénix », M. Amadou, 66 ans, est habitué à renaitre de ses cendres et a affirmé qu’il passerait de la « prison à la présidence ».
L’opposition a accusé le pouvoir de vouloir passer en force et dénoncé des fraudes ainsi que les résultats « grotesques » annoncés par la Céni depuis la fin des opérations de vote.

Mais cette accusation a été rejetée par le ministre de l’Intérieur Hassoumi Massaoudou, assurant que le scrutin était « transparent et libre ».

M. Issoufou, qui avait été crédité de plus de 50% lors des premiers dépouillements partiels, a vu son score redescendre à mesure que les résultats étaient publiés par la Céni.

La coalition des partis d’opposition COPA 2016 avait affirmé jeudi se réservait « le droit de rejeter l’intégralité des résultats » en cas de victoire au premier tour de M. Issoufou.

La campagne a été marquée par des violences entre partisans du président et opposants qui contestent la régularité du fichier électoral. Elle a été précédée de l’arrestation de personnalités et de l’annonce d’un putsch raté par le pouvoir.

SOURCE : AFP