Interview exclusive du colonel Yark Damehame, ministre de la sécurité et de la protection civile

Une « Force Sécurité Elections » (FOSEL/2013) a été mise en place par le gouvernement en avril dernier, en vue de sécuriser les prochaines élections législatives et locales prévues pour la première semaine du mois de juillet. Cette Force est composée de 6.500 gendarmes, policiers et gardiens de préfectures. Quelle est la mission précise de cette Force? Comment se prépare-t-elle? La création de cette Force n’est-elle pas de nature à créer une psychose dans la population? Où en est-on avec les dossiers des élèves morts à avril dernier? Une série de questions posées au ministre de la sécurité, le colonel Yark Damehame dans une interview exclusive à l’Agence Savoir News. Il n’a pas manqué de se prononcer sur les dernières manifestations de l’opposition.

Savoir News: Les togolais se préparent à aller aux urnes pour les élections législatives. Le gouvernement a mis sur pied la FOSEL/2013. Comment se préparent ces éléments? Et leurs missions sur le terrain?

Col Yark Damehame:<

/strong> Comme vous venez de le dire, nous sommes en année électorale. Nous avons les élections législatives et locales en vue. Et pour accompagner ce processus, le gouvernement par décret, a créé la FOSEL, composée de 6.500 gendarmes, policiers et gardiens de préfectures. Le recyclage s’est déroulé dans toutes les régions. L’apothéose a eu lieu à Lomé. La FOSEL met beaucoup l’accent sur la prévention. Vous savez que par le passé, nous avions eu des élections violentes. Depuis 2007, le gouvernement, suite à l’Accord Politique Global (APG), a décidé que les élections soient dorénavant gérées par la force de sécurité intérieure, à savoir: la police et la gendarmerie.

La FOSEL a pour mission de prendre toutes les dispositions pour que ces élections se déroulent dans le calme et que les togolais accomplissent leur devoir civique sans heurts pendant cette période électorale (avant, pendant et après le scrutin).

Q: D’aucuns estiment que la mise en place de cette FOSEL est de nature à créer dans le mental des populations, que les élections sont des moments de violences où des forces de l’ordre doivent être préparées pour aller « au front ». Certains observateurs n’hésitent pas à fustiger les images d’entraînement montrées à la télévision lors de la formation des éléments où il y a toujours deux camps: des forces de l’ordre face aux manifestants qui brûlent des pneus et lancent des projectiles. Que répondez-vous à ceux-là?

R:<

/strong> Je dirai à nos compatriotes de rester tranquilles. Nous avons comme principe la prévention. La formation des éléments et les exercices qui sanctionnent la fin sont une manière de dire: nous voulons des élections apaisées, mais s’il arrive que certains choisissent des voies de violence pour exprimer leurs recours, la FOSEL est préparée pour les décourager et préserver la paix.

Q: Vous ne pensez pas que ces genres d’images peuvent agir sur le comportement des populations?

R: Si on faisait ces exercices dans la clandestinité, les gens pouvaient dire qu’ils ne savent pas ce qui se passe. Nous voulons surtout habituer nos compatriotes à ce que nous faisons. Je ne pense pas que le fait de montrer des images des exercices, peut créer de psychose dans la tête de nos populations. Sincèrement, je ne crois pas. Au contraire, c’est une manière de leur dire: on ne le souhaite pas, mais si cela venait, vous avez une Force prête pour gérer la situation.

Q: L’un des dossiers qui a fait couler beaucoup d’encre et de salive est le décès par balle de l’élève de 12 ans le 15 avril à Dapaong, et d’un autre élève 72 heures plus tard. Vous étiez également monté au créneau pour apporter quelques éléments de précision. Vous confirmez que l’auteur du tir mortel est déjà traduit devant la justice? La procédure évolue ? Et les autres, où sont-ils?

R:<

/strong> Nous regrettons ce qui s’est passé à Dapaong. Une manifestation qui a entraîné la mort de deux élèves.

Pour le cas d’Anselme, mort par balle, nous n’avons pas hésité à prendre nos responsabilités. D’abord, le gouvernement a condamné l’acte, après avoir présenté ses condoléances aux familles éplorées. Aussitôt, une commission a travaillé sur ce qui s’est passé. En moins d’une semaine, on a pu aboutir aux conclusions qui mettaient en cause un fonctionnaire de police qui, sous l’effet de la colère, a fait usage de son arme, alors qu’il ne devait pas le faire. C’est une faute professionnelle grave. Elle est aussi pénale. Il est à la maison d’arrêt de Dapaong depuis un mois.

Pour le cas de Douti, je suis un peu embêté de la réaction de certaines personnes. Nous ne nions pas que l’enfant était parmi les manifestants. Il y a une dame qui était témoin et qui a récupéré l’enfant, après qu’il ait couru. La dame a fait son témoignage devant la famille de l’enfant et devant le procureur. Elle a vu deux agents qui ont poursuivi l’élève, mais elle a précisé que ces agents ne l’ont pas rattrapé. Une fois encore, c’est regrettable. Nous déplorons la mort de ces deux enfants. Et nous pensons que nous devons chacun, tirer des leçons: que ce soit du côté de la famille, du côté des forces de sécurité que du côté du corps enseignant. Ces enfants ne se sont pas retrouvés dans les rues gratuitement, on leur a dit de sortir dans les rues pour que le gouvernement cède.

Q: Quelle appréciation faite vous des récentes manifestations de l’opposition?

R:<

/strong> Rien ne vaut la paix, rien ne vaut la sécurité quel que soit notre degré de démocratie. Nous devons préserver ces vertus. Nous ne pouvons rien faire sans la paix et sans la sécurité. Si les gens veulent manifester, qu’ils restent dans le cadre légal. Nous n’avons aucune intention de bloquer qui que ce soit. Mais, lorsque nous voyons que les manifestations peuvent déboucher sur des choses regrettables, il est quand même de la responsabilité du gouvernement de prendre des mesures. C’est vraiment dommage, ce qui s’est passé mardi dernier. Des gens vont au service, garent leur voiture et les voient brûler. Ils ne sont même pas concernés par les manifestations. On ne peut pas supporter cela. J’en appelle à la responsabilité des responsables de l’opposition. Je sais qu’ils ont de problème de maîtrise de leur base. Quand on est chef, il faut savoir maîtriser sa base. Ils disent beaucoup de choses, mais ils n’arrivent pas à contenir la base. Il appartient au gouvernement de prendre ses responsabilités. On ne peut pas laisser faire et regretter après. Qu’ils ne pensent pas que le communiqué signé des ministres de la sécurité et de l’administration territoriale est de nature à les empêcher d’exercer leur liberté de manifestation. Loin de là. Mais lorsque les conséquences seront dommageables et aux intérêts de l’Etat et aux intérêts privés, il nous appartient de dire: ça va. FIN

Propos recueillis par Junior AUREL

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